dimanche 28 octobre 2018

Carte postale

Dans ces ailleurs lointains où je n'irai jamais,
Ces îles alanguies au creux des mers du sud,
Rivages lumineux hérissés de palmiers,
Sable blanc sable noir, brûlant sous le soleil,

Dans ces ailleurs lointains où je n'irai jamais,
Ces îles improbables où croisent les voiliers,
Rivages magiciens où s'oublient les chagrins,
Sable chargé de rêves, encombré de regrets,

Dans ces ailleurs lointains où je n'irai jamais,
Ces îles, ces lagons, de turquoise accablés,
Rivages alourdis par la mélancolie,
Sable désenchanté, aux grains éparpillés,

Dans ces ailleurs lointains où je n'irai jamais,
Ces îles illusoires, infortunés tropiques,
J'abandonne au rivage la carcasse esseulée,
Le sable d'une vie vécue sans exister.


D'après une photo de Daniel Hjalmarsson sur Unsplash


vendredi 21 septembre 2018

La pluie sur mes carreaux, en rigoles sinueuses.
Rigole, pluie, rigole bien, il n'y a que toi à trouver ça amusant.

Dans cette eau que tu pleures sur mes carreaux,
il y a mes espoirs et mes larmes
mes rêves et mes cauchemars
mes victoires, mes défaites.

Surtout mes défaites.

Défaite.
Il y a si longtemps que je suis défaite.
Délitée
Dissoute
Vidée
Exterminée
Anéantie.

Il y a si longtemps que je fais semblant.
Longtemps que je sais que rien ne m'attend là-bas.

La vie, ce désastre consenti.

Accords plaqués sur un piano sans âme,
Pour remplir le silence
Et croire à l'existence.

L'eau coule à l'océan,
un couteau plein de sang,
C'est la vie qui s'en va, en rigoles sinueuses.
Et le rire de la pluie sur un carreau fêlé.

Il n'est finalement pire assassin de soi que soi-même.


lundi 16 avril 2018

Le bonheur résiste parfois,
On ne sait pas toujours pourquoi.

Ça tient pourtant dans un regard,
Dans un oubli, dans un retard,
Et les jours s'enfuient en riant,
On demeure là, suppliant,
Le cœur à l'arrêt, sur le quai,
Serrant dans ses mains un bouquet,
Les fleurs défraîchies des regrets,
Les dommages sans intérêts,
Tant de désespoir enfermé
Entre les pétales froissés
De cette vie qu'on a ratée,
Ce train, qu'on a laissé filer,
Bêtement, parce qu'on croyait
Que le temps nous appartenait.

Le bonheur résiste parfois,
On ne sait pas toujours pourquoi.
Et quand se déchire la brume
Il ne reste que l'amertume.
 

mercredi 4 avril 2018

"Être heureux,
c'est toujours être heureux malgré tout."
 
Clément Rosset, Le Monde de l’Éducation, Paris, 1999

dimanche 1 avril 2018

"Sur les chemins parsemés de préjugés anciens,
j'ai traîné mes silences désorientés."

Raymond Queneau, Contes et Propos, Paris, 1981

jeudi 29 mars 2018

Cloud, bug et cookies
Poème informatique

Une souris verte,
Sur un tapis gris.
J'arrondis ma main sur son dos,
Je lui presse le bout du nez.
Elle émet un petit bruit,
Un couinement doux et mécanique,
Et soudain sur mon écran bleu
Surgit un nuage à mon nom.

Un nuage, à mon nom !

Dans chaque goutte, un secret,
Un rêve, un rire, un chagrin,
Virtuelle bibliothèque
Tissée au fil de mes nuits,
Au fil des silences et des cris.

C'est alors qu'un minuscule insecte
Saute à pieds joints sur mon nuage,
Bouleverse mes mots, mes idées,
Et désoriente l'ordinateur,
A qui il en faut peu, j'avoue,
Pour gaiement s'emberlificoter.
Le pauvre en reste tout perplexe,
Il bafouille et perd sa connexion.
Je n'ai plus qu'à fermer mon nuage,
Laissant derrière moi au passage,
Pour chacun des sites visités,
Quelques biscuits pour subsister
Jusqu'à ma visite prochaine.

vendredi 16 mars 2018

Toujours et jamais,
les mots les plus douloureux de la langue française.
De toutes les langues sans doute.
En réalité c'est la pensée qu'ils expriment qui est insupportable.
Tu es parti pour toujours, je ne te reverrai jamais.
Chagrin abyssal. Seul le remède du temps... et encore.
On fait avec, ou plutôt on fait sans. On s'accommode, on fait semblant.
Avec talent, même.
Mais au fond de soi, la perte est incommensurable.
Définitive.
Irrémédiable.
 Et c'est ainsi, de deuil en deuil, à petits pas,
qu'on apprivoise sa propre fin.